Par Rachel Kiddell-Monroe, SeeChange Initiative ; et Malcolm Ranta, Ilisaqsivik Society, Clyde River. La publication originale est disponible ici.
Si le Dr Theresa Tam constate les premiers signes d'un ralentissement de la pandémie de COVID-19 au Canada, elle prévient également que "le marathon ne fait que commencer". Ce message fait mouche dans les 25 communautés inuites du Nunavut, où le marathon pourrait rapidement se transformer en sprint.
À ce jour, aucun cas de COVID-19 n'a été signalé au Nunavut. Mais treize cas ont été signalés au Nunavik, au Québec, huit au Yukon et cinq dans les Territoires du Nord-Ouest. Ce n'est qu'une question de temps avant que le virus responsable de la maladie de COVID-19 n'atteigne le Nunavut.
Les Inuits font partie des communautés les plus vulnérables du Canada, et les dirigeants communautaires du Nunavut en sont parfaitement conscients. Ce sont eux qui savent le mieux comment servir leurs communautés. Ils savent qu'il n'y a pas deux communautés identiques et qu'aucune communauté n'est homogène. Si les mesures de santé publique prises par le gouvernement sont importantes, seuls les dirigeants communautaires peuvent les adapter aux réalités de leur communauté.
Pourtant, alors que les dirigeants des communautés du Nunavut font entendre leur voix pour défendre leurs communautés dans le cadre de la réponse au COVID-19, il semble que leurs demandes tombent dans l'oreille d'un sourd.
Prenons un exemple. Le 25 mars 2020, le conseil du hameau de Clyde River a envoyé une lettre à l'administrateur en chef de la santé publique du Nunavut pour demander une interdiction totale de voyager dans la communauté, y compris pour les personnes venant d'autres communautés du Nunavut, une augmentation des tests à l'échelle de la communauté, des fournitures de nettoyage et des fonds pour créer des espaces d'isolement. Toutes ces demandes ont été rejetées.
Conscientes de l'urgence de prévenir et d'endiguer le COVID-19, les communautés du Nunavut n'attendent pas le gouvernement et ont pris les choses en main. Arctic Bay a imposé des couvre-feux et le conseil du hameau de Kugaaruk a interdit les vols vers la communauté. Le conseil du hameau de Clyde River a nommé un coordinateur COVID-19 pour les situations d'urgence et a élaboré ses propres plans de préparation aux situations d'urgence pour protéger sa communauté. Il a demandé conseil à des spécialistes des situations d'urgence tels que la Croix-Rouge canadienne et Médecins sans frontières, et a adapté les lignes directrices de l'Organisation mondiale de la santé et de l'Agence de santé publique du Canada.
La lutte contre la pandémie de COVID-19 exige une forte coordination des approches de santé publique à tous les niveaux de gouvernement au Canada. Le gouvernement du Nunavut a pris des mesures énergiques pour que le territoire reste exempt de COVID-19, notamment en imposant un isolement obligatoire de 14 jours aux résidents du Nunavut qui reviennent dans des localités situées en dehors du territoire. Mais ces mesures ne suffisent pas. Il faut une coordination étroite avec les communautés qui se trouvent en première ligne de la pandémie de COVID-19. Et ce n'est pas le cas.